vendredi 30 décembre 2011

Hasse et l'opera seria au XVIIIe siècle (3) : Les raisons d'une éclipse

Dans sa Biographie universelle des musiciens, François-Joseph Fétis notait en 1841 que, si peu de compositeurs avaient connu autant de succès de leur vivant que Johann Adolf Hasse, il en était peu qui fussent aussi oubliés : au début du XXe siècle, Romain Rolland allait jusqu’à dire que l’oubli de Hasse était la pire injustice de l’histoire de la musique. Alors que le Français Charles de Brosse, en voyage à Venise à la fin des années 1730, y découvrait que l’ « homme fêté » n’y était pas Antonio Vivaldi, mais le « Saxon », le public contemporain peine aujourd’hui bien souvent à se figurer que les compositeurs lyriques les plus réputés des décennies centrales du XVIIIe siècle ne s’appelaient pas Haendel ou Vivaldi, mais Hasse, Porpora, Jommelli ou Galuppi.

dimanche 25 décembre 2011

Hasse et l'opera seria au XVIIIe siècle (2) : Brève histoire de l'opera seria

Il est impossible de comprendre véritablement l’œuvre lyrique de Hasse sans connaître le genre auquel elle appartient : l’opera seria, et plus particulièrement l’opera seria métastasien du milieu du XVIIIe siècle.

Pietro Trapassi, dit Métastase (1698-1782) 

jeudi 22 décembre 2011

Culture et foi : un malentendu ?

Les récents scandales qui ont marqué la vie théâtrale française, avec les pièces sacrilèges de Romeo Castellucci et de Rodrigo Garcia, qui s’en prenaient à la figure du Christ, le premier en jouant sur l’ambiguïté, le second avec la violence la plus outrancière et la plus caricaturale, ont donné lieu, parmi les catholiques, à des réactions diverses.

La pièce Golgota Picnic de Rodrigo Garcia : une attaque violente contre la religion chrétienne
  

mardi 20 décembre 2011

La crise du progressisme chrétien (4) : Progressisme chrétien et catholicisme intégral

Cet article est la suite du compte rendu de l'ouvrage d'Yvon Tranvouez. Les premières parties de ce compte rendu peuvent être lues ici :


Le Père Fessard SJ, adversaire du progressisme chrétien

Catholiques et communistes, d’une lecture passionnante, apparaît donc comme une excellente contribution à l’histoire du progressisme chrétien. Loin de limiter son investigation à La Quinzaine, ce qui aurait eu pour effet de restreindre le champ de son étude à un journal qui apparaît essentiellement comme le fait de jeunes intellectuels (p. 118) et qui passe aussitôt pour difficilement lisible pour un ouvrier (p.  124), Yvon Tranvouez s’attache avec le cas des Chrétiens du XIIIe à retracer l’histoire d’une genèse : « non pas celle du progressisme chrétien, mais celle des progressistes chrétiens ; non pas celle d’une théorie, mais celle d’une pratique » (p. 275). Bien qu’issu d’articles publiés tout d’abord séparément, l’ouvrage conserve ainsi une forte cohérence et articule avec autant de précision que de clarté les aspects aussi bien théoriques que pratiques du problème du progressisme chrétien, montrant comment celui-ci s’élabore peu à peu à la faveur des événements et de l’expérience des militants chrétiens comme d’une réflexion plus doctrinale dont la polémique n’est pas absente : l’auteur met notamment en évidence les débats qui opposent, avant même la fondation de La Quinzaine, les différentes figures par la suite considérées comme progressistes (pp. 88-98), et le rôle joué par les adversaires du progressisme, tels le P. Fessard ou Mgr de Solages, dans sa « cristallisation » en formules doctrinales claires. Yvon Tranvouez retrace ainsi avec minutie l’histoire de la construction du concept de progressisme chrétien à l’occasion de vigoureux débats intellectuels (p. 230), sans pour autant en négliger la portée pratique, au carrefour de l’engagement aux côtés du Parti communiste et des formes extrêmes de la mission ouvrière.  

Hasse et l'opera seria au XVIIIe siècle (1) : Biographie de Johann Adolf Hasse

Salué comme l'un des plus grands musiciens de son temps, trop oublié aujourd'hui, J.A. Hasse (1699-1783), qui fut l'un des maîtres de l'opera seria italien du XVIIIe siècle, me semble mériter d'être connu davantage. Ce premier article vise à donner un bref aperçu de sa carrière et de sa vie.

"Giovanni Adolfo Hasse, detto il Sassone" 

dimanche 18 décembre 2011

La crise du progressisme chrétien (3) : Perspectives

Cet article est la suite du compte rendu de l'ouvrage d'Yvon Tranvouez dont on peut trouver ici les deux premières parties : 
Partie 1

La troisième partie de l’ouvrage d’Yvon Tranvouez s’attache à remettre en perspective l’affaire de La Quinzaine, s’efforçant de la resituer tant par rapport aux expériences missionnaires qui voient le jour après 1945 que par rapport à la réflexion de quelques observateurs.

mardi 13 décembre 2011

La crise du progressisme chrétien (2) : La Quinzaine, du lancement à la condamnation

Cet article est la suite du compte rendu de l'ouvrage d'Yvon Tranvouez dont on peut trouver ici la première partie : 


Mgr Guerry, adversaire résolu de La Quinzaine

La Quinzaine, son lancement et ses lecteurs
C’est l’aventure de La Quinzaine, de la publication de son premier numéro à sa condamnation, qui occupe la deuxième grande partie de l’ouvrage. Le journal paraît tout d’abord sous le titre Quinzaine, revendiquant clairement l’héritage de Sept. Il est cependant confronté dès son lancement à une grave crise : confrontés aux critiques dont font l’objet Quinzaine et le Bulletin d’Information Religieuse (BIR) du P. Desroches, tant de la part de Rome que de l’épiscopat français, les dominicains doivent se retirer de la rédaction du journal, qui est sauvé par l’intervention le 23 janvier 1951 de Mgr Feltin, archevêque de Paris (p. 114).

lundi 12 décembre 2011

La crise du progressisme chrétien (1)

Compte rendu : Yvon TRANVOUEZ, Catholiques et communistes. La crise du progressisme chrétien (1950-1955), Cerf, 2000, 363 pages



« Pouvait-on s’opposer au communisme sans se couper de la classe ouvrière ? » C’est par une réponse négative à cette « question décisive » qu’Yvon Tranvouez, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Bretagne occidentale, caractérise la « zone dangereuse du progressisme chrétien » (p. 16), dont la définition se révèle par ailleurs malaisée tant elle recouvre des mouvements, des individus, des projets et des situations divers qui rendent difficile d’en faire l’histoire.

dimanche 4 décembre 2011

Du mirage de la société européenne



Ces derniers temps, Eva Joly annonçait son désir de remplacer le siège de la France au conseil des Nations Unies par un siège européen, projet qu’elle a su faire accepter au Parti Socialiste, et ce sans prendre en considération l’intérêt supérieur de son propre pays (pardon, l’un de ses deux pays), et en faisant fi de l’incohérence d’une telle décision puisque le Royaume Uni a lui aussi un siège. Pour justifier cet acte odieux, Eva Joly et ses sbires ont invoqué la destinée de l’Europe et celle de la société Européenne qu’elle incarne.

Il ne s’agira pas ici de laisser libre cours à mes soupçons à l’endroit de la personne de la politicienne Eva Joly, que l’on sent si prompte à privilégier l’intérêt des 26 à celui de la France, et dont le messianisme vert, si caractéristique de cette pulsion de mort païenne qui habite l’écologisme, donne l’impression qu’un tel personnage est tout droit sorti des Démons de Dostoïevski. 

jeudi 1 décembre 2011

Comment définir l’identité française ? Les écueils d’une tentative : la « charte des droits et devoirs du citoyen français »

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage
Ou comme celui-là qui conquit la Toison,
Et puis est retourné plein d'usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !



Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m'est une province et beaucoup davantage
?


Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux,
Que des palais romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine.



Plus mon Loire gaulois que le Tibre latin,
Plus mon petit Liré que le mont Palatin,
Et plus que l'air marin la douceur angevine.

Cinq siècles après du Bellay, la France existe encore, mais a bien de la peine à savoir qui elle est, ou ce qu’elle est.

mardi 29 novembre 2011

A propos de l’appel de Rouen (2) : Les « acquis de Vatican II »

La Lettre ouverte aux chrétiens rédigée par un « groupe de laïcs catholiques du diocèse de Rouen », comme nous nous sommes efforcés de le montrer dans notre précédent article[1], ne peut prétendre se fonder sur la sainte Ecriture, qu’elle ne cite jamais et qu’elle semble contredire clairement en certains de ses passages, notamment en ce qui concerne l’Eucharistie et l’indissolubilité du mariage. Sur quelle autorité l’appel de nos laïcs se fonde-t-il donc ?

La crainte d’un « enterrement » de Vatican II
En relisant la Lettre, on note très vite les allusions au dernier Concile. Il s’agit de « prendre au sérieux l’enseignement du Concile », de préserver un « acquis de Vatican II ». Quant à l’une des deux autorités citées[2], le P. Bessière, le prêtre qui déclarait avoir excommunié Benoît XVI, elle invoque elle aussi le Concile : « N’assistons-nous pas à l’enterrement discret du Concile Vatican II ? »
Nos « laïcs catholiques du diocèse de Rouen » prétendent donc bénéficier, contre l’interprétation de l’Ecriture communément admise par le Magistère ecclésiastique, de l’autorité d’un Concile œcuménique, qu’ils jugent supérieure.  Mais qu’en est-il en réalité ?

samedi 26 novembre 2011

A propos de l’appel de Rouen

Le 25 novembre, Paris Normandie publiait, sous le titre « Les laïcs catholiques secouent l’Eglise », un article[1] qui se faisait l’écho de l’affaire qui agite le diocèse de Rouen depuis que des prêtres y ont décidé d’appuyer l’ « appel à la désobéissance » lancé par une partie non négligeable du clergé catholique autrichien. De quoi s’agit-il au juste ?

Que se passe t-il dans le diocèse de Rouen ? Un vent de révolte, une soif de rénovation ? Il y a quelques semaines, dix-sept prêtres signaient un «Appel à la désobéissance». Et ces jours-ci, quelques laïcs catholiques se sont engouffrés dans la brèche et publient une Lettre ouverte aux chrétiens. Un texte paraphé par plus de 170 personnes, pour la plupart des membres actifs de mouvements d'Action catholique, d'animation du centre théologique universitaire, de membres de la Fraternité franciscaine...

jeudi 24 novembre 2011

Billet de campagne 3 – Un mariage civil homosexuel bien mal défendu


Le 12 novembre, un article de L’Express débutait comme suit :

« Le maire de Cabestany, dans les Pyrénées-Orientales, a symboliquement célébré le mariage civil de deux hommes pour inscrire le mariage homosexuel dans le débat de la présidentielle de 2012. »

S’il suffit que l’un des 36 782 maires que compte la France s’adonne en public à un acte illégal pour que ledit acte devienne partie intégrante du « débat de la présidentielle de 2012 », la campagne promet d’être très riche. Passons.

Discrimination ?

« On est des citoyens comme les autres », affirment nos deux messieurs, comme pour proclamer un argument massue qui rendrait à lui seul scandaleuse la législation actuelle sur le mariage. Certes, ils sont des citoyens comme les autres – personne ne peut le contredire. Mais justement, étant des citoyens comme les autres, ils ont, comme tous les autres citoyens, le droit de se marier avec une personne de sexe opposé. Il n’y a ici aucune discrimination – au contraire, c’est, pour une fois, l’égalité la plus parfaite qui s’applique : riches, pauvres, noirs, blancs, chanceux, malchanceux, parisiens, provinciaux, sachez-le : vous pouvez tous vous marier avec une seule personne (à la fois, du moins) et de sexe opposé ! Pour qu’il y ait « discrimination », en effet, c'est-à-dire inégalité, il faudrait qu’à situation similaire, le traitement soit différencié. Objection : c’est le cas. Un homosexuel ne peut pas se marier, car seuls les hétérosexuels le peuvent : inégalité, discrimination, horreur. Nous répondons laconiquement : faux. Un homosexuel peut tout à fait se marier, de même qu’un hétérosexuel, avec une personne de sexe opposé. L’égalité entre eux est juridiquement parfaite.

samedi 19 novembre 2011

« De nouvelles forces pour construire la société de demain » : A propos d’une phrase du cardinal Vingt-Trois

Sur le blogue Riposte catholique, Maximilien Bernard faisait il y a peu un bref examen du lexique utilisé par le cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris, dans son discours d’ouverture de l’Assemblée plénière de la Conférence des évêques de France, dont il est le président :
Dans son discours d’ouverture de l’Assemblée plénière de la CEF à Lourdes, le cardinal Vingt-Trois n’a prononcé une seule fois les mots :
Jésus
Christ
Esprit
Quant à « Dieu », il est cité dans une expression familière :
 Grâce à Dieu, de nombreuses initiatives d’entrepreneurs commencent à aller en ce sens [dans le sens d'une consommation équitable]
Le terme « religion » apparaît 10 fois, dont 9 fois au pluriel…[1]
« On en est là », titrait laconiquement Maximilien Bernard.

Un jugement sur les JMJ
Il n’est pas sans intérêt d’examiner plus attentivement ce long discours qui aborde les problèmes les plus divers, du retour des JMJ de Madrid au printemps arabe, en passant par la crise du système économique et politique européen, les élections et les questions relatives à l’islam et à la laïcité. Il s’agit en effet de faire un large « tour d’horizon » susceptible d’ouvrir un « temps de débat sur l’actualité » aussi bien religieuse que profane.
 C’est cependant les paroles du Cardinal sur le retour des JMJ qui paraissent les plus propres à retenir l’attention :
Enfin, il me semble que, à travers cette forte expérience spirituelle des jeunes, notre Église en France peut se féliciter du signe qui est ainsi donné à nos concitoyens. Dans un climat d'incertitude sur l'avenir, la mobilisation forte de cinquante mille jeunes constitue une espérance pour notre Église, et, plus largement, elle dit quelque chose sur la jeunesse de notre pays. Elle manifeste que cette jeunesse n'est pas sans ressource ni sans capacité d'engagement. Dans une société vieillissante, nous voyons qu'il y a de nouvelles forces pour construire la société de demain.
Ces quelques lignes méritent qu’on s’y intéresse : elles expriment les raisons pour lesquelles le cardinal Vingt-Trois voit dans les JMJ de Madrid « une espérance pour notre Eglise » et un « signe » donné à ceux qui ne connaissent pas Jésus-Christ. Que nous disent donc ces JMJ sur « la jeunesse de notre pays » ? Qu’elle est encore capable d’une « forte mobilisation », qu’elle n’est pas « sans ressource ni sans capacité d’engagement » et représente donc dans notre « société vieillissante » de « nouvelles forces » en mesure de « construire la société de demain ». Ce qui n’est peut-être pas faux, mais semble assez curieux.

mardi 15 novembre 2011

Compte rendu de la conférence de Godeleine Lafargue, « Le « gender », une idéologie de mort »


« Seul le sexe biologique nous identifie mâle ou femelle, mais ce n’est pas pour autant que nous pouvons nous qualifier de masculin ou de féminin. » Cette phrase, issue des nouveaux manuels scolaires destinés aux lycéens français, était l’un des exemples par lesquels Godeleine Lafargue ouvrait sa conférence, avant de retracer brièvement l’histoire de la théorie du genre. Ne désignant initialement qu’une catégorie grammaticale, le genre a pris une connotation précise nouvelle en 1968 sous la plume de Robert Stoller dans Sex and gender, qui dissociait déjà le sexe, lié aux organes, de l’identité sexuelle, liée à la liberté. Cette distinction était reprise en 1972 par la féministe américaine Ann Oakley dans Sex gender and society, mais ce n’est qu’en 1990 que le genre fait l’objet d’une véritable théorisation par Judith Butler, dans un ouvrage intitulé Gender trouble (publié en France en 2005). Il s’agit d’éviter la confusion entre sexe physiologique et identité sexuelle : l’identité sexuelle aurait été imposée par la société patriarcale imprégnée de christianisme. Le genre devient dès lors un rôle social imposé par notre culture, une construction sociale liée à des stéréotypes de notre culture judéo-chrétienne, que la nouvelle théorie se propose précisément de déconstruire.

dimanche 13 novembre 2011

Abbé Jean MILET, Dieu ou le Christ ? Les conséquences de l’expansion du christocentrisme dans l’Eglise catholique du XVIIe siècle à nos jours, Paris, Editions de Trévise, 1980, 334 pages

L’abbé Jean Milet, professeur à l’Institut Catholique de Paris à partir de 1966, rappelé à Dieu en 2008, s’est tout d’abord signalé par ses travaux philosophiques sur Bergson ou Gabriel Tarde. Dans Dieu ou le Christ ? Les conséquences de l’expansion du christocentrisme dans l’Eglise catholique du XVIIe siècle à nos jours, publié en 1980, l’abbé Milet n’entend cependant pas faire œuvre de philosophe ou de théologien, mais effectuer une « étude de psychologie sociale » (p. 7) s’adressant tant aux croyants auxquels elle pourrait « révéler certaines orientations cachées de leur Eglise, et de ce fait provoquer une prise de conscience et peut-être des sursauts » comme aux incroyants, auxquelles elle pourrait « montrer, sur le vif, comment un corps social peut modifier ses structures profondes et quelles conséquences […] peuvent en découler » (p. 8). S’il est question de doctrine, c’est donc avant tout en tant que les problèmes doctrinaux modifient le « comportement mental, affectif et pratique » (p. 7) du corps social qu’est l’Eglise catholique.

mardi 8 novembre 2011

Billet de campagne 2 – Peur du peuple ?

« Pour approfondir la démocratie, nous renforcerons le rôle du Parlement, nous introduirons une dose de proportionnelle aux élections législatives, nous accorderons le droit de vote aux étrangers aux élections locales, nous transformerons le Conseil Constitutionnel en une véritable Cour Constitutionnelle indépendante, nous supprimerons leur dotation publique aux partis qui ne respecteront pas l'objectif de la parité, nous lutterons contre les conflits d’intérêt et nous imposerons une limitation du cumul des mandats. »

            Reprenons l’examen des propositions du candidat socialiste. L’actualité offre une belle transition à notre raisonnement.

Bref retour sur l'affaire Castellucci

Note : Cet article a déjà été publié, dans une version très légèrement différente, sur le blogue Benoît et moi (http://benoit-et-moi.fr/2011-III/).

La protestation menée depuis quelques jours par des catholiques contre la pièce donnée à Paris au Théâtre de la Ville par Roméo Castellucci, Sur le concept du visage du Fils de Dieu, a fait ces derniers temps grand bruit. Les faits seraient assez bien connus s’ils n’avaient fait l’objet de récits pour le moins partiaux qu’en ont livré la grande presse et les principaux médias. De jeunes catholiques, à l’appel de l’institut Civitas, ont manifesté chaque soir, priant et chantant devant le théâtre pendant les représentations de cet étrange spectacle. Quelques-uns d’entre eux ayant, au cours des premières manifestations, jeté quelques œufs ou perturbé le déroulement de la pièce, on a vu les journalistes dénoncer aussitôt les abominables violences commises par les « fondamentalistes chrétiens » – il n’est pas anodin que cette même expression ait servi à désigner le tueur norvégien – certains allant jusqu’à parler de « prises d’otage » ou d’ « attaques terroristes ». Très curieusement, on n’avait guère vu les mêmes journalistes dénoncer de même les jets d’œufs autrement plus fournis et les attaques autrement plus graves auxquels se sont livrés les anarchistes de la CNT et les trotskystes du NPA contre les catholiques venus prier le rosaire devant l’hôpital Tenon en septembre dernier à l’appel de l’association SOS-Tout-petits.

vendredi 28 octobre 2011

Billet de campagne 1 – Approfondir la démocratie, pour quoi ?

La campagne commence à peine. François Hollande s’accorde quelques jours de vacances. Le temps pour nous de prendre un peu de recul, dans ce premier billet d’une longue série qui permettra, nous l’espérons, d’éclairer modestement les enjeux politiques actuels. Imitons donc le candidat socialiste, qui, pour mieux affronter dans quelques semaines les sables mouvants de la politique politicienne à la française, se concentre pour le moment – imaginons-le – sur ce qui est stable, rassurant : nos paysages, nos campagnes, nos monuments, c’est-à-dire, osons le mot, nos racines, corréziennes ou non. Mais il nous faut faire de la politique : impossible d’évoquer ici la beauté de la nature en cette période de la Toussaint, qui se pare d’orange, de jaune, de rouge, tout en demeurant froide et silencieuse. Oublions un instant cette douce expérience, qui, si elle était véritablement comprise, nous replongerait dans l’essentiel et rendrait inutile tout ce qui va suivre. Portons notre regard sur ce qui, en politique, semble l’élément le plus stable : les institutions. Certes, la France en a connu de multiples. Mais, vous en conviendrez, il y aura toujours moins de régimes que d’idées, d’hommes et d’affrontements politiques dans l’histoire d’un pays.

mardi 25 octobre 2011

Recension : Catherine MASSON, Le cardinal Liénart. Evêque de Lille (1928-1968), Cerf, Paris, 2001, 769 pages



Y a-t-il eu une « option fondamentale » que l’épiscopat français aurait prise au lancement de l’Action catholique selon le cardinal Marty, à la condamnation de l’Action française selon Jean Madiran, et que le second concile du Vatican aurait « authentifiée[1] » ?
L’ouvrage de Catherine Masson, maître de conférence à la Faculté libre de sciences humaines de Lille, Le cardinal Liénart. Evêque de Lille (1928-1968), issu d’une thèse de doctorat soutenue en 1999, fournit peut-être quelques éléments de réponse. « Evêque de Pie XI » selon sa propre expression, figure emblématique d’une génération de prélats français nommés dans le sillage de la condamnation de l’Action française, créé cardinal par Pie XI dès 1930, Achille Liénart était présenté au Pape par le cardinal Gasparri comme « l’un de nos évêques nouvelle manière » (p. 155), et Yves-Marie Hilaire, dans la préface qu’il donne à l’ouvrage, le qualifie de « véritable cardinal de la mission » (p. 11). C’est avant tout sous ce rapport, celui de l’effort pastoral de l’évêque de Lille, que Catherine Masson envisage la vie et l’action de cette grande figure française de l’Eglise du XXe siècle.

Recension : Jean GARRIGUES, La République des hommes d’affaires (1870-1900), Aubier, 1997, Paris, 432 pages.

« On pourrait dire que la troisième République est le fruit d’un « contrat » entre les républicains « historiques », maîtres du pouvoir depuis le 4 septembre 1870, et les milieux d’affaires, ralliés progressivement à partir de 1871 » (p. 11). C’est à partir de ce constat que Jean Garrigues, professeur à l’Université d’Orléans, met en œuvre une réflexion qui poursuit et prolonge les recherches entreprises dans le cadre de sa thèse de doctorat sur Léon Say et le Centre gauche. Il s’agit en effet, dans La République des hommes d’affaires, de mettre en évidence le rôle joué par les réseaux et l’influence du Centre gauche, représentant la grande bourgeoisie conservatrice et libérale, tant dans le ralliement des milieux d’affaires à la République que dans la forme prise par la vie et les institutions du nouveau régime, auxquels ils fournissent, de 1871 et 1879, plus de la moitié des ministres. L’auteur note en effet que ce champ d’investigation est demeuré largement délaissé par les historiens de la troisième République, d’autant plus que l’étude des réseaux d’influence unissant monde des affaires et pouvoir politique s’est prêtée à des discours polémiques sur le complot bourgeois ou le complot juif (p. 13). Jean Garrigues s’efforce donc de dresser un « diagnostic le plus fiable possible », « sans diabolisation ni hagiographie » en effectuant l’analyse systématique des « réseaux d’influence réciproque et des convergences entre les pouvoirs » (p. 13) de la proclamation de la République en 1870 à l’opposition au Bloc des gauches en 1902. 


dimanche 16 octobre 2011

Recension : Jean MADIRAN, Les droits de l’homme. DHSD, éditions de Présent, Maule, 1995, 160 pages.


Rédigé tout d’abord en 1988 à l’occasion des célébrations du bicentenaire de la déclaration des droits de l’homme de 1789, Les droits de l’homme. DHSD de Jean Madiran résume la réflexion de l’auteur sur la démocratie des droits de l’homme, définie comme celle des « droits de l’homme sans Dieu ». Il ne s’agit aucunement pour Jean Madiran de constituer une étude exhaustive sur les droits de l’homme, leur théorie et leurs développements historiques, mais d’en montrer les ressorts et la philosophie, sous la forme de chroniques dont le style alerte et la brièveté rendent l’ouvrage d’un abord très aisé. Dans les trois premiers chapitres, l’auteur s’emploie à dégager les principaux traits d’une véritable religion des droits de l’homme dont il montre les conséquences logiques dans les quatre chapitres qui suivent.